« Sauvez les éleveurs, allez chez Carrefour, U, Casino, Auchan… » : avec ce message inscrit sur une banderole, au pied du magasin Leclerc du Kremlin-Bicêtre, dans la banlieue parisienne, les éleveurs de la Fédération nationale bovine (FNB) interpellent les consommateurs sur la réalité des pratiques du distributeur. En 2016, l’enseigne a signé, comme Système U, Carrefour, Intermarché, Lidl, Casino et Auchan, l’engagement « Cœur de gamme » qui consiste à mettre en rayon de la viande bovine conforme à un cahier des charges plus exigeant (viandes issues du troupeau allaitant, durée de maturation, critères de conformation…), un produit plus qualitatif qui rémunère davantage les éleveurs, autour d’un euro supplémentaire au kilo. Or, depuis la signature de l’engagement par Leclerc le 13 septembre 2016, la démarche ne s’est pas concrétisée. La FNB a donc mené le 17 mai une action nationale, devant une quinzaine de magasins Leclerc dans toute la France. « On a ciblé surtout des magasins dans les villes », explique Bruno Dufayet, président de la FNB. Dans les zones plus rurales, des magasins qui sont localement en contact avec les éleveurs ont mis en place la démarche.
Retour de valeur nécessaire Un message d’autant plus important que le consommateur se montre sensible aux conditions de rémunération des producteurs, ce que Leclerc, qui a communiqué sur son engagement lors de la signature, ne semble pas ignorer. Cette démarche se heurte néanmoins à la politique de prix bas dont le distributeur est un ardent défenseur. Or, « la variable d’ajustement sur les prix bas est toujours le prix payé au producteur », souligne Bruno Dufayet. Dans la démarche Cœur de gamme, un identifiant, « éleveur et engagé », permet au consommateur de reconnaître les produits qui rémunèrent les éleveurs au-dessus de leurs coûts de production et donc de vivre de leur métier. Dans ce Leclerc du Kremlin-Bicêtre, pas d’étiquetage de ce type, mais les éleveurs de la FNB ont repéré deux morceaux de viande de qualité identique, vendue 15,90 € le kilo dans une barquette standard, mais plus de 22 € le kilo dans une barquette au packaging « Premium », avec l’inscription « race de nos régions ». « Ces 6 euros de plus vont directement dans la poche du distributeur », dénonce Cédric Mandin, secrétaire général de la FNB. « On utilise l’image positive de l’éleveur, sans le rémunérer », explique-t-il, alors qu’« on pourrait faire la même chose avec un euro de plus pour l’éleveur ». Une meilleure valorisation reste indispensable pour le maintien de l’élevage français, car « nous avons un niveau de revenu qu’on ne peut plus accepter », estime Bruno Dufayet. « 8 000 animaux par semaine pourraient rentrer dans le cahier des charges Cœur de gamme », poursuit-il, alors qu’il n’y en a actuellement que 2 500. L’objectif de la FNB est donc d’arriver au plus vite à ces 8 000 animaux valorisés un euro de plus le kilo, soit pour l’éleveur 400 à 450 euros de plus par animal.
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